Je commençais à me demander si cette année je pourrais commencer à visiter les jardins, tellement cet hiver n’en finissait pas. En plus du temps maussade, il y a mes autres occupations. Mais enfin, le soleil a daigné se montrer et réchauffer l’atmosphère et j’ai pu faire ma première visite ce vendredi 7 juin. J’ai décidé de ne visiter que quelques parcelles à chaque fois et de prendre mon temps. Prendre le temps d’apprécier, de sentir, de respirer, d’écouter, le thème de cette année s’y prêtant fort bien puisque c’est : Jardins des sensations.
C’est donc avec tous mes “sens” en alerte que je me suis approché de la parcelle n°1 que les auteurs ont intitulé “gram(in)ophone”. Ce gramophone est une structure imposante cachée derrière les herbes. On y accède par un chemin de bois bordé de mille plantes et herbes semi-sauvages.
J’ai de la chance ce matin là. Je suis presque seul et peux écouter tranquillement les sons annoncés. En plus de ces sensations sonores et olfactives, je me délecte de tous les jeux de lumières que les ouvertures de la structure, dans laquelle je suis entré, provoquent. L’absence de couleurs n’est pas gênante. Le vert des herbes et des arbres derrière se marie très bien avec l’aspect bois et fer de la structure. Quel autre nom pourrais-je lui donner ? Ce n’est pas une casemate… d’ailleurs cela ne semble pas non plus être un objet fabriqué par l’homme. J’y vois plutôt un animal d’un autre âge à l’état de fossile à l’intérieur duquel nous pouvons déambuler. C’est un peu le charme de ce jardin qui a la faculté de titiller notre imagination.
C’est en visitant le festival des jardins en 2010 (jardins corps et âmes) que j’avais fait la connaissance de Billie Holiday, et c’était déjà dans la parcelle n°2. Heureux numéro 2 qui, cette année, se nomme “BLUE” et va me faire connaître Derek Jarman. |
Mes premières recherches m’ont conduit vers le nom du film : Blue. Année ? 1993 ! J’étais au Brésil à cette époque et je me souviens avoir assisté à un film qui parlait de couleur : bleu. Il s’agissait d’une trilogie et il y avait les trois couleurs du drapeau français. Bien que ce film soit bien sorti la même année, ce n’est pas celui de Derek Jarman. Car il s’agit bien de deux films différents. “Bleu” est un film franco-polono-suisse de Krzysztof Kieślowski et “Blue” est le dernier film de Derek Jarman. Il est sorti en 1993, quelques mois avant le décès du réalisateur des suites du SIDA.
Dans ce jardin, c’est bien un hommage à ce réalisateur disparu trop tôt que les concepteurs ont voulu nous faire partager au travers des citations de ce cinéaste écrites sur un fond bleu, citations tirées du film lui même. “Bleu est l’obscurité rendue visible” Je médite cette phrase tout en fixant cet écran de cinéma devenu bleu et entouré de fleurs bleues.