Sept juin : suite

Le 7 juin, j’avais pris d’autres photos et par la suite je suis retourné à plusieurs reprises découvrir les autres parcelles. Mais alors là, on peut dire que je n’ai pas assuré… et nous voici à la veille de février, c’est-à-dire que dans deux mois, un autre festival va commencer. En attendant l’ouverture des jardins des péchés capitaux, je vais donc essayer de me souvenir quelles sensations les parcelles de 2013 m’ont apportées.

Après le bleu de la parcelle n°2, c’est le blanc qui nous éblouit dans le jardin n°3. Là encore des palissades avec des citations. Et au centre du jardin, du noir… Car les citations sont de Kazimir Malevitch, grand peintre polonais mort d’un cancer en 1935 et auteur entre autre d’un tableau assez célèbre baptisé carré noir sur fond blanc. Mais même si on ne connait pas cela, on peut goûter l’harmonie de ce jardin et le mélange entre le végétal et le métal noir qui se décline sous forme d’une grille et d’un banc qui nous invite à nous reposer quelque temps. Ce jardin prête sincèrement à la méditation.

Je m’approche maintenant de la parcelle 4 qui au premier abord n’a de jardin que le nom. Ici, la Nature semble vouloir reprendre ses droits et une végétation luxuriante et semi sauvage envahit la parcelle, tentant de faire disparaître ce qui semble avoir été une piscine. Le plongeoir nous attend mais oserons nous plonger au milieu d’orties menaçantes, même si à côté se dresse encore la haute chaise du maître nageur. Dans ce cadre exubérant, les sensations dégagées nous rappellent que l’homme n’est qu’un petit élément de la Nature et que celle-ci peut se révolter à tout moment. Mais elle reste si chaleureuse et si diversifiée qu’on peut s’attarder un peu pour découvrir toutes ces espèces amenées ici par les concepteurs.

 

Après avoir régalé nos yeux dans la parcelle 4, ce sont nos sens olfactifs qui vont être sollicités dans la parcelle 4 bis.

Rien que le nom « les sniffettes » nous invite à sentir, à respirer, pour mieux apprécier toutes ces odeurs qui pourraient presque nous enivrer. On se place sous une cloche et on hume… A chaque cloche, de nouvelles odeurs et hors des cloches, d’innombrables couleurs, avec derrière le profil du majestueux château de Chaumont sur Loire.

Les yeux ! L’odorat ! et maintenant les papilles dans le jardin n° 5, le jardin à goûter. Plus qu’un jardin, un paysage tout entier, beau à voir, beau à croquer. Retour au terroir, aux cultures plus traditionnelles qui donnent des produits peut-être moins standardisés, moins bien calibrés mais o combien plus « goutus ». Dans ce jardin, on retrouve un espace de convivialité, une notion de bon sens et de partage humain. Et pas besoin de l’affubler de ce nouveau vocable « BIO » pour en ressentir tout le naturel, toute l’authenticité.

Le soleil est si rare, en ce mois de juin 2013. Personnellement, je n’ai pas trop à me plaindre. La communion de Séréna, qui se passait le 2 juin, s’est déroulée sous un soleil timide mais présent toute la journée. La pluie, les orages et le vent sont vite revenus. Aussi, ce 16 juin, nous n’hésitons pas à faire un tour au festival des jardins, Séréna ma fille, Sitta mon épouse et moi même. Cette fois, pas question de limiter notre visite à trois ou quatre parcelles. C’est le tour complet qu’il nous faut faire, pour avoir un aperçu global des sensations que nous offre ce vingt-deuxième festival. Nous parcourons donc, en flânant quand même, c’est dimanche, nous avons tout l’après-midi devant nous, les vingt-six parcelles, vingt quatre plus deux “bis”.

Si vous voulez me suivre, j’ai partagé ma ballade en deux pour ne pas surcharger mes galeries photo.

La ballade commence en musique, dans le coeur d’un gramophone (UN) d’où nous sortons pour atterrir sur l’écran bleu de Derek Jarman (DEUX). Nous y sentons “la mort” mais c’est pour mieux renaître dans la parcelle suivante, “Renaissance” (TROIS). Et si on allait se baigner… mais la piscine (QUATRE) semble abandonnée. Voila que des effluves nous attirent sous des casques à snif, (QUATRE bis) juste avant d’aller goûter (CINQ) aux merveilles d’un potager sur paille. Pour bien digérer, allons courir avec le vent (SIX) puis nous irons voir les sons et entendre les couleurs (SEPT). Et voici encore des odeurs, mélange magnifique (HUIT) de lavande et de faux jasmin qui voudrait nous entraîner vers le chaos. Nous nous retrouvons soudain en apesanteur (NEUF) pour assister à un concert de grenouilles et un peu plus loin un piano rose (DIX) laisse filer sa mélodie qui nous plonge dans une agréable ivresse. C’est une explosion de tous nos sens qui semblent projetés dans l’infini (ONZE) que l’on distingue à travers des miroirs en forme de hublots. Sommes nous dans le jardin d’Alice ou de Narnia? N’ayons pas peur, franchissons la porte de cette armoire (DOUZE) et rejoignons ces balançoires (TREIZE) qui nous feront retrouver la magie de notre enfance.

Encore des miroirs qui font comme une jetée (QUATORZE) qui nous emmène non sur l’océan mais dans des champs où sont rangées des meules de foin (QUINZE). Toute l’herbe n’a pas été coupée, et en particulier certaines orties (SEIZE) auxquelles il est déconseillé de se frotter même si on est à la recherche de notre royaume perdu (DIX-SEPT). Ce n’est pas l’horloge du lapin blanc qui nous rappellera l’heure mais un cadran solaire (DIX-HUIT) sur les bords duquel il est agréable de laisser traîner ses pieds. C’est l’heure de se reposer en humant le parfum du blanc (DIX-NEUF). Après avoir bien respiré on peut revenir jouer à frôler les sons (DIX-NEUF bis) et se préparer à naviguer sur la rivière des sens (VINGT) sur laquelle il nous suffira d’emprunter une gondole pour regagner le jardin d’amour (VINGT et UN). Après le blanc, le rouge et le rosé dans ces vignobles aux doux parfums et chaudes couleurs (VINGT-DEUX) qui nous invitent à visiter les terres à sons (VINGT-TROIS). Notre promenade dans ce monde des sensations se termine au bord d’une rizière (VINGT-QUATRE).

Si ce n’était l’envie folle de découvrir ce que nous réserve, cette année, le GOUALOUP, je recommencerais cette ballade tout de suite bien que mes sens soient tout à fait rassasiés.

passerelle

vers le goualoup

Sensation

 Par les soirs bleus d’été, j’irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l’herbe menue :
Rêveur, j’en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.

Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l’amour infini me montera dans l’âme,
Et j’irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, — heureux comme avec une femme.

Mars 1870.Arthur RIMBAUD

Ce sont bien de jolis sentiers bordés de fleurs variées que vous pourrez suivre dès le 24 avril pour aller admirer les différentes parcelles de ce 22ème festival. Vous y laisserez vos sens capter la plénitude de ces lieux magiques et l’imagination de ses créateurs vous emportera dans leurs rêves…

AFF_FESTIVAL_VF_2013